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CFDT Crédit Agricole Languedoc

Du chômage à la santé au travail, petit panorama de la rentrée

4 Septembre 2018, 23:05pm

Publié par CFDT CA Languedoc

Du chômage à la santé au travail, petit panorama de la rentrée

Après la période estivale, nous vous proposons un article de synthèse sur l'actualité sociale de la rentrée. Au menu : les discussions sur la future réforme de l'assurance chômage, la santé au travail qui revient sur le devant de la scène, l'égalité F/H, le projet de loi Pacte, etc.

 

Après le vote début août de la loi sur l'Avenir professionnel (*) qui réforme la formation professionnelle, la rentrée est marquée par les débats autour de l'avenir de l'assurance chômage et de la santé au travail, ainsi que par la valse-hésitation de l'Exécutif quant à l'application début 2019 du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu (lire dans cette même édition notre article expliquant les enjeux de cette décision). On ne saurait non plus oublier la perspective du remaniement gouvernemental après la démission annoncée le 27 août de Nicolas Hulot, le ministre de l'Environnement, un événement qui a tourné à la crise politique alors que l'Exécutif, déjà affaibli par l'affaire Benalla, prépare son budget 2019 dans un contexte économique moins favorable que prévu.

 

 Premières orientations budgétaires

A ce propos, le Premier ministre a annoncé au Journal du Dimanche fin août la fin des cotisations sociales pour les heures supplémentaires effectuées par les salariés à compter du 1er septembre 2019, sachant qu'une autre décision mécontente le patronat : le gouvernement transforme bien le CICE (crédit d'impôt compétitivité emploi) en baisse de cotisations l'année prochaine mais la baisse des cotisations patronales interviendra en deux temps. Il y a aura en janvier 2019 une réduction de 6 points de la cotisation maladie mais la deuxième baisse (- 4 points pour l'allégement général de charges dit Fillon) n'interviendra qu'au 1er octobre 2019.

 

Assurance chômage : une nouvelle négociation imposée par l'Exécutif

Rappelons le contexte. Après avoir imposé aux partenaires sociaux une renégociation de l'assurance chômage en début d'année (nouveaux droits pour les démissionnaires et pour les indépendants, etc.), Emmanuel Macron a finalement décidé de ne pas s'en tenir là, alors que le chômage a dû mal à refluer fortement en France. L'Exécutif demande à nouveau aux partenaires sociaux de négocier d'ici la fin de l'année une nouvelle convention d'assurance chômage, mais à l'intérieur d'un cadre financier strictement fixé par l'Etat, l'objectif étant, a déjà écrit le Premier ministre, "que ce régime soit plus cohérent, plus efficace dans la lutte contre la précarité et plus favorable au retour à l'emploi". Et cette fois, la question d'un retour de la dégressivité des allocations chômage est clairement évoquée par la majorité à propos des cadres, l'Exécutif menaçant toujours les employeurs d'instaurer un bonus-malus afin de dissuader l'usage excessif de contrats précaires.

 

 Des discussions en bilatérales dans un climat de méfiance

La lettre de cadrage du gouvernement aux partenaires sociaux pour cette négociation doit leur être adressée avant la fin septembre, après que le Premier ministre aura reçu, avec la ministre du Travail et la ministre des Solidarités et de la Santé, les partenaires sociaux à Matignon. Ces bilatérales, qui portent également sur la santé au travail et le paritarisme, ont commencé la semaine dernière et se terminent aujourd'hui avec notamment les rendez-vous de la CFDT et de l'UNSA. Ces rencontres semblent traduire un nouveau rafraîchissement des relations entre les partenaires sociaux et le gouvernement, FO se ralliant même à la CGT et à Solidaires pour lancer un appel à la mobilisation pour le 9 octobre. Les syndicats redoutent en effet une approche trop strictement budgétaire des dossiers sociaux, certains estimant, comme la CGT, que le gouvernement n'a pas modifié sa méthode depuis les ordonnances : "Rien n'a changé. On nous convoque pour nous expliquer ce qu'on va faire cette année", a pesté le secrétaire général de la CGT. Hier, dans une interview au Monde, Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, a prévenu le gouvernement : "Si vous laissez de l'espace à la démocratie sociale pour le faire, la CFDT s'en saisira. Si vous voulez nous dicter un chemin qui pour nous ne fait pas sens, nous ne l'emprunterons pas".

L'annonce par le Premier ministre, fin août, que les pensions des retraités ne seront plus revalorisées au niveau de l'inflation (elles progresseront de 0,3% seulement en 2019 et 2020) n'a rien arrangé, alors que la réforme des retraites se profile. Pour mémoire, reçus avec le patronat le 17 juillet à l'Elysée, syndicats et patronat avaient émis le souhait d'être davantage associés au calendrier des réformes sociales et s'étaient plutôt montrés rassurés par les propos du Président de la République.

 

Financement de l'indemnisation des arrêts de travail : le débat est sur la table

La majorité a laissé planer cet été la menace de mettre à la charge des entreprises le coût des arrêts de travail de courte durée (4 jours au-delà des 3 jours de carence pour les arrêts de moins de 8 jours) au vu de la progression chaque année du coût de l'indemnisation. Le Premier ministre a même comparé cette évolution ainsi : "C'est comme si notre pays avait instauré un jour de congé supplémentaire". Edouard Philippe s'est depuis montré plus prudent mais la lettre qu'il a envoyée aux partenaires sociaux le 25 août pour "tracer les contours du programme de travail pour l'année à venir en matière sociale" mentionne bien ce sujet. Le courrier déplore une organisation de notre système d'indemnisation des arrêts maladie "coûteux, inéquitable et déresponsabilisant". Le Premier ministre dit aux partenaires sociaux qu'il est possible "de déterminer ensemble les conditions dans lesquelles nous pouvons, dans la concertation, engager sa transformation pour garantir l'efficacité de cette dépense et renforcer la responsabilité de l'ensemble des acteurs".

 

Santé au travail : un rapport chasse l'autre et une négociation est envisagée

Que va faire le gouvernement au sujet de la santé au travail, un domaine sur lequel les organisations syndicales reprochent à l'Exécutif d'avoir cédé au patronat sur le chantier de la pénibilité et de sa prévention ? Le Premier ministre a évoqué cette question avec les syndicats et le patronat lors des bilatérales et souhaité que les partenaires sociaux engagent une négociation sur "un système de prévention renforcée", le champ de cette négociation "pouvant être élargi à d'autres thématiques".

 

 Le rapport Lecocq insiste sur la culture de la prévention

Cette négociation pourrait se baser, du moins le gouvernement le souhaite-t-il, sur les orientations préconisées dans le rapport remis le mardi 28 août au Premier ministre par la députée LREM Charlotte Lecocq, Bruno Dupuis (consultant senior en management) et Henri Forest (ancien secrétaire confédéral CFDT). Les auteurs du rapport proposent d'améliorer la prévention en entreprise en regroupant tous les acteurs de la santé au travail pour que les entreprises aient partout un interlocuteur unique et "de confiance qui soit en mesure de répondre à toutes leurs demandes", selon les mots de Charlotte Lecocq. Il s'agirait de créer, dans chaque région, une entité unique baptisée "Région santé travail" qui centraliserait les offres en matière de santé au travail. Cette structure n'exercerait aucune mission de contrôle et regrouperait les services proposés par les services de santé au travail interentreprises, les Aract (ergonomes, psychologues, spécialistes en organisation), les Carsat (formation en prévention, laboratoires) et l'OPPBTP (prévention dans le BTP). Au niveau national, cette structure unifiée prendrait le nom de France Santé travail et regrouperait les expertises de l'Anact, de l'INRS et de l'OPPBTP national.

Par ailleurs, le rapport propose de créer une unique contribution aux actions de prévention payée par les entreprises, qui regrouperait les cotisations existantes. Cette cotisation varierait en fonction des actions engagées par l'entreprise en matière de prévention. Autrement dit, il s'agirait d'un bons-malus visant à inciter les entreprises à agir pour préserver la santé de leurs salariés. Aujourd'hui, les cotisations AT-MP sont déjà modulées selon le taux de sinistralité de l'entreprise mais, observe le rapport, "le caractère incitatif du dispositif est limité par le fait que de très nombreuses entreprises, celles de moins de 20 salariés, sont soumises à un taux collectif indépendant de leur sinistralité réelle". Le rapport, qui recommande de "former aux déterminants organisationnels et humains de la culture de sécurité les intervenants en prévention, les managers de proximité et les membres du CSE et les conseils extérieurs à l'entreprise, suggère également d'abonder les fonds du paritarisme "pour donner les moyens aux partenaires sociaux de participer à la conception, la mise en oeuvre et le suivi des politiques publiques en matière de santé au travail". Enfin, le document recommande de remplacer le document unique d'évaluation des risques -DUER) par "un plan de prévention travaillé avec a branche" qui permettrait "de bien identifier les risques et d'élaborer un plan d'actions pragmatique".

 

 Le rapport Frimat propose de nouvelles sanctions

Le gouvernement n'a en revanche fait aucune publicité à un autre rapport, remis pourtant en avril dernier mais rendu public ces derniers jours en catimini, traitant de la prise en compte de l'exposition des salariés au risque chimique. On sait que le gouvernement a choisi de ne plus prendre en compte le risque chimique au titre de la pénibilité, privant les salariés exposés de tout droit à la formation, au temps partiel ou à un départ en retraite anticipé. Elaboré par le professeur Paul Frimat, ce rapport ne s'inscrit pas vraiment dans l'approche du rapport Lecocq. Il préconise non seulement d'imposer aux entreprises la transmission d'informations à leur service de santé au travail concernant l'exposition de salariés aux risques chimiques, mais aussi de doter l'inspection du travail de nouveaux pouvoirs de sanctions. Le rapport suggère ainsi une nouvelle amende administrative en cas de non-respect des obligations formelles en matière de risque chimique. La procédure d'arrêt temporaire de l'activité pourrait être utilisée en cas de manquements à des mesures essentielles de préventions et une surcotisation ou malus s'appliquerait en cas de risque chimiques exceptionnels, les entreprises agissant pour la prévention bénéficiant elles d'un bonus. Enfin, le rapport suggère de bonifier les droits à formation des salariés exposés au risque chimique, cette exposition étant mesurée non par l'employeur mais par le service de santé au travail.

 

Égalité professionnelle : quel dispositif technique pour mesurer les écarts salariaux F/H ?

C'est une des dispositions du texte sur l'Avenir professionnel : un objectif de suppression des écarts de rémunération entre femmes et hommes figurera dans la loi et les entreprises devront publier tous les ans leurs indicateurs relatifs à ces écarts, dès le 1er janvier 2019 au delà de 250 salariés et à partir de 2020 de 50 à 249 salariés, sachant qu'elles devront provisionner des enveloppes de rattrapage si les écarts ne sont pas résorbés. Tout cela suppose de définir les paramètres techniques de cette mesure. Le gouvernement souhaite qu'un logiciel soit mis au point et mis à la disposition des entreprises. C'est l'objet de la mission confiée à la DRH France de Schneider Electric, qui doit remettre à la ministre du Travail et à la secrétaire d'Etat à l'Egalité entre les femmes et les hommes un rapport sur ce sujet. La date de remise de ce rapport, qui devrait intervenir rapidement si le gouvernement ne veut pas tarder à pouvoir appliquer ses textes, n'est pas connu.

 

Projet de loi Pacte et plan pauvreté : enfin au programme ?

Adopté le 18 juin en conseil des ministres après plusieurs reports, le projet de loi Pacte (plan pour la croissance des entreprises) arrive enfin devant l'Assemblée nationale : une commission spéciale des députés auditionne demain Bruno Le Maire, le ministre de l'Economie, et examinera le texte jusqu'au 15 septembre avant l'examen en séance plénière (**).

Ce projet, qui traite aussi des administrateurs salariés et de l'objet social de l'entreprise, vise d'abord à simplifier la création d'entreprise et à faciliter la croissance des TPE-PME. Un des moyens utilisés pour cette fin est la suppression de certains seuils et le relèvement d'autres. Ainsi l'obligation pour une entreprise d'avoir un règlement intérieur passe de 20 à 50 salariés, de même que l'application du taux plein pour la contribution à l'aide au logement. Enfin, la mise à disposition d'un local syndical commun ne s'imposera plus à partir de 200 salariés (le seuil est supprimé) mais à partir de 250 salariés.  Par ailleurs, le projet vise à favoriser le développement de l'intéressement et de la participation en supprimant le forfait social sur l'intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés et le forfait social sur la participation et l'abondement employeur pour les entreprises de moins de 50 salariés.

Signalons par ailleurs que Muriel Pénicaud, la ministre du Travail, a indiqué dimanche sur RTL être défavorable aux propositions d'une vingtaine de députés de la République en Marche (LREM) qui ont souhaité cet été une nouvelle extension des possibilités d'ouverture dominicale. "Ce n'est ni à mon agenda ni dans mes priorités", a dit la ministre en estimant suffisantes les possibilités offertes par la législation.

Enfin, le gouvernement doit présenter courant septembre "les stratégies de réforme du système de santé et de lutte contre la pauvreté", un plan dont l'annonce avait été repoussée, et lancera "les travaux préparatoires à la réforme de la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées". 

 

(*) La loi n'est toujours pas promulguée, le Conseil constitutionnel ne s'étant pas encore prononcé sur le texte : il devrait d'ailleurs le faire aujourd'hui. Le gouvernement prépare d'ores et déjà les très nombreux décrets d'application nécessaires à ce texte fleuve.

(**) Le Parlement fera sa rentrée le 12 septembre. Outre le projet de loi Pacte, les parlementaires devraient examiner le projet de loi de lutte contre la fraude qui comprend des mesures sur le travail détaché. 

actuel-ce.fr